Willi Heidelbach - Casse typographique

Willi Heidelbach - Casse typographique

Ce chapitre propose une analyse des valeurs propres à la création de caractères et plus globalement, à la typographie.
Afin de mieux comprendre les questions qui nous intéressent, nous verrons progressivement:

  1. Ce qui distingue la typographie de l’écriture
    Écritures typographique et manuscrite
  2. Les deux niveaux de lecture envisagés dans un document
    Titrage et labeur
  3. Pourquoi la typographie s’efface derrière son message
    Fonctionnalisme : la lettre au service du texte
  4. Les relations qu’entretient la typographie avec les arts
    Symphonie typographique
  5. En quoi le texte est-il considéré comme coloré
    Couleur typographique

Avant d’interroger plus en profondeur les fondements de la typographie, il convient de noter que l’écriture que nous abordons est mécanique, dactylographique, c’est-à-dire informatisée, normée, régulière. Bien que l’ordinateur soit devenu un objet quotidien considérablement répandu, les moyens qui lui sont nécessaires (un ordinateur pour composer, un logiciel pour mettre en page, une imprimante pour éditer) sont encore un peu lourds et la froideur et la neutralité que ce type d’écriture suggère l’exclut presque totalement du cercle privé et le réserve essentiellement à un usage professionnel. Même s’il est vrai que l’apparition et la diffusion de ces machines ont étendu les acteurs potentiels du domaine de la typographie et, par ce fait, entraîné une baisse de la qualité, peu encore sont les personnes écrivant leurs cartes de vacances à l’aide de leur ordinateur ou envoyant des lettres à leur famille en pianotant sur leur clavier (cependant, cette expansion a permis simultanément une libération de cette discipline qui était jadis réservée à une élite, et a ainsi ouvert un champ infini d’expérimentations jusqu’alors peu concevable).

José Mendoza y Almeida - Père Castor

José Mendoza y Almeida - Père Castor

On retrouve donc parallèlement à ces lettres mécaniques, l’écriture manuscrite, plus vivante, qui est encore très largement utilisée dans le cercle privé, notamment car elle a l’avantage d’être unique, personnelle, et offre la possibilité de retrouver en elle son auteur.

Il est évident que l’écriture que nous souhaitons interroger dans ces pages est la première citée. Il est en effet peu envisageable d’écrire à la main un texte où chaque lettre serait constituée de deux couleurs. Au contraire, l’écriture typographique, bien qu’héritée de l’écriture manuscrite, peut se permettre ce genre d’extravagance: l’effort demandé en sera toujours le même, celui de taper sur les lettres de son clavier.

André Baldinger - Eiffel

André Baldinger - Eiffel

Les premières lectures amènent à établir une distinction entre lettre vue et lettre lue. La première, dite de titrage, peut se permettre plus de liberté, la beauté et la puissance visuelle de chaque lettre l’emportant sur leur compréhension. La seconde, dite de labeur, sert à la composition des textes et par conséquent ne peut être aussi extravagante que la typographie de titrage, elle ne doit pas demander d’effort au lecteur mais au contraire s’effacer derrière le message qu’elle transmet. Les impératifs de clarté, de lisibilité semblent trouver leur absolu dans des alphabets imprimés en encre noir sur un papier blanc.

Pourquoi en noir sur blanc ?

Il s’agirait du meilleur contraste permettant de distinguer la lettre de son support. La couleur tend à s’effacer au profit de la forme de la lettre. Mais est-il possible, comme semblent vouloir le faire les dessinateurs de caractère, de concevoir une forme sans couleur ? Ou, pour formuler différemment, l’idéal recherché par les typographes en terme de sobriété, d’effacement du dessinateur au profit de la noble cause qui est celle de donner vie au texte, est-elle nécessairement incompatible avec l’intégration de couleurs au sein même des lettres ?

Arrêtons-nous quelques instants sur ses valeurs transmises par la typographie de labeur. Si les alphabets qui vont alimenter ce mémoire n’appartiendront vraisemblablement pas en majorité à cette catégorie, analyser leurs caractéristiques nous permettra peut-être d’esquisser les raisons qui semblent actuellement limiter la création et l’expérimentation typographiques. Ainsi les puristes diront, comme le souligne Lewis Blackwell, que la typographie est un moyen de connexion de la pensée qui peut se prétendre l’architecture de notre langage écrit. Pas étonnant donc que les dessinateurs de caractères méticuleux souhaitent s’effacer derrière leurs créations. Celles-ci n’auraient en réalité que l’unique et noble but de transmettre le message tel que voulu par son auteur. Mais ce message est-il nécessairement monochrome ? Les lettres doivent-elle impérativement se dissimuler derrière le contenu des mots auxquels elles donnent vie ?

Marinetti - Les Mots en Liberté (1919)

Marinetti - Les Mots en Liberté (1919)

Marinetti dans son manifeste futuriste déclare en 1909 avoir l’intention de faire redoubler la force expressive des mots et souhaite ainsi employer dans la même page trois ou quatre encre de couleurs différentes et vingt caractères différents s’il le faut. On retrouve cette envie de jouer avec la forme du texte chez les dadaïstes (1916-25), plus tôt encore dans les jeux de mots typographiques de Lewis Carroll dans Alice au pays des merveilles en 1865, chez Stéphane Mallarmé bien sûr, avec son coup de dés lancé en 1897, mais aussi dans les Calligrammes d’Apollinaire publiés en 1918. Plus tard, Moholy-Nagy, responsable du cours préliminaire de typographie au Bauhaus, souhaitant que les pages de texte gris se transforment en narrations colorées, militera en faveur de l’introduction d’une tension très forte dans les mises en page, en faisant contraster les éléments visuels tels que multicolore/gris.

Tous ces exemples n’ouvriraient-ils pas la porte à une collaboration entre le fond et la forme ? La forme, c’est-à-dire la lettre, n’a-t-elle pas les facultés d’amplifier le message que souhaite faire passer le fond ? La couleur n’est-elle qu’une fantaisie purement décorative, une aspiration éphémère qui ne pourrait que dénaturer un texte en corrompant ses lettres ?

Intéressons-nous maintenant à une autre qualité essentielle recherchée par les professionnels de ce domaine. Quand des typographes et des dessinateurs de caractères parlent de leur métier, ils en arrivent très rapidement à évoquer la notion de rythme, autant celui de la page que des caractères qui la composent, et font ainsi le rapprochement entre leur discipline et la musique. En essayant de filer davantage la métaphore, on peut assez facilement établir des ressemblances entre ces deux arts. Ainsi, Raymond Gid évoque-t-il le résultat de l’œuvre du typographe comme une symphonie qui s’inscrit sur le grand silence de la page blanche, accordant ainsi au texte sa sonorité visuelle. Les lettres sont alors perçues comme autant de notes de musique.

Raymond Gid - Le message du débarquement

Raymond Gid - Le message du débarquement

Cassandre quant à lui rapporte des similitudes avec le monde de la danse et compare ainsi la lettre à un mouvement isolé qui, associée à d’autre, établit une véritable chorégraphie. Raymond Gid, toujours lui, atteint un autre domaine de la création artistique en déclarant que la structure d’une page complexe s’apparente d’évidence à la peinture abstraite. Mais n’auraient-ils pas oublier un instrument important pour parfaire leur concerto ? La couleur n’a-t-elle pas sa place dans cette orchestration ? Jan Tschichold déclare dans un essai intitulé De la typographie au typographisme que la couleur constitue un élément d’action aussi bien que le caractère.

Pourtant le terme de couleur n’est pas absent du langage typographique. Bien au contraire. La couleur semble même être une des qualités les plus importantes quand on évalue le travail d’un typographe. Mais paradoxalement, il ne désigne pas une teinte (bleu, rouge, etc.) mais une valeur. En réalité, ce qui est appelé la couleur typographique, ou encore le gris typographique, est la synthèse effectuée par l’œil entre le blanc du papier et le noir du texte (la couleur de l’encre). Il s’agit de la vision générale que l’on a d’un texte. Elle s’observe en plissant légèrement les yeux. Un gris harmonieux permet d’évaluer la qualité d’une mise en page et du caractère utilisé.

Thomas L’Excellent - Manuel de typographie (2009)

Thomas L’Excellent - Manuel de typographie (2009)

Il n’est donc pas étonnant d’entendre des créateurs renommés chanter les louanges de la couleur, typographique. Mais si, comme le dit Raymond Gid, le gris devient couleur, qu’en est-il des autres couleurs ? Pourquoi les autres domaines visuels bénéficieraient de cette ressource sensible et puissante alors que la typographie devrait s’en passer ? Avant de voir les applications où la couleur vient s’immiscer au sein de nos alphabets, intéressons-nous d’abord à comprendre ce qu’elle est.

Espace de couleurs

Espace de couleurs

L’analyse de la couleur qui va suivre s’appuie sur des écrits d’artistes et de philosophes, mais également de scientifiques ; elle tente de développer une approche sensible de la couleur, basée essentiellement sur l’expérience. Cependant, avant de chercher à comprendre ses différentes causes et effets, il convient d’essayer de situer la couleur et l’intérêt qu’elle a suscité au sein de nos civilisations. La première constatation réside dans la longévité et l’attachement ininterrompu à la produire, la retenir, l’expérimenter, l’employer, l’observer et immanquablement à l’expliquer.

Grotte de Lascaux

Grotte de Lascaux

Histoire

Un des premiers témoignages remonte à l’époque des chasseurs-cueilleurs itinérants, soit il y a plusieurs dizaines de milliers d’années. On a en effet découvert que ceux-ci n’avaient pour tout bagage que des silex déjà ébauchés pour faire des outils, et des couleurs. Ils parcouraient parfois des dizaines de kilomètres pour aller les chercher et savaient les cuire pour produire différentes nuances.

Plus tard, les Égyptiens et les Grecs, ont montré un enthousiasme remarquable pour les créations colorées. Ils n’hésitaient pas à enrichir leurs statues, leur bas-reliefs et même directement leurs monuments à l’aide de différents pigments. On sait par ailleurs que les romains détestaient le bleu, et associaient cette couleur aux barbares, aux femmes peu vertueuses ou encore aux hommes ridicules. En Chine, le jaune, la couleur la plus lumineuse, symbole de la sagesse, était réservé au Fils du Ciel. Le blanc quant à lui était associé dans ce pays au deuil ; il servait à accompagner le défunt au royaume de la pureté des Cieux. Au Mexique, le dieu de la terre Xipe Totec se reconnaissait sur les représentations par son habit de couleur rouge. Encore aujourd’hui, l’Église catholique figure à l’aide de couleurs symboliques sa hiérarchie sacerdotale.

Les exemples sont nombreux et riches d’apprentissage. Il en ressort essentiellement que les couleurs ont toujours été étroitement liées à leur contexte sociologique, culturel et parfois même économique. Certains pigments étaient ainsi choisis pour leur rareté, leur complexité à obtenir, et donc pour leur valeur.

Amarante

Amarante, une des 400 couleurs recensées sur Pourpre.com

Langue

Un autre élément significatif de la présence de la couleur dans les sociétés se trouve dans le langage même. Il est un révélateur de l’intérêt et de l’inclinaison des populations pour celle-ci. Les inuits par exemple disposent de 17 mots pour désigner le blanc ; les Islandais utilisent le même mot pour le vert et le bleu. Dans la société occidentale, on note une grande difficulté à nommer précisément les couleurs: alors que leur obtention s’est facilitée et en a multiplié le nombre au cours des siècles, nous disposons de seulement 30 noms pour les identifier.

Cette question n’est pas si anodine qu’elle puisse le paraître ; des études ont montré que l’acuité de perception des couleurs est augmentée dans les groupes ethniques disposant d’une langue riche en mots décrivant les nuances colorées.

Goethe - Le Triangle des Couleurs

Goethe - Le Triangle des Couleurs

Pour enrichir sa connaissance des phénomènes colorés, le meilleur apprentissage est l’expérimentation: manipuler la couleur en apprendra plus sur son essence que n’importe quel ouvrage ou n’importe quelle théorie. La perception est différente selon les individus, il convient de découvrir la couleur par soi-même. Goethe, Albers, ou encore Itten, ont écrit des livres remarquables pour transmettre leur réflexion sur la couleur. Pourtant, tous insistent sur la priorité de la pratique sur la théorie. Pour Goethe elle est même plus importante ; car si la théorie peut se tromper, par l’oubli ou la méconnaissance de certaines causes ou conséquences, l’expérience est quant à elle une vérité immuable.

Différents types de couleur

Au cours des siècles, l’étude de la couleur a permis d’établir trois domaines où interviennent les phénomènes colorés: — physiologique, qui est propre à l’humain, — physique, qui met en jeu la lumière, — et chimique, qui s’intéresse à la matière. Voici quelques unes de leurs caractéristiques.

Ces différentes couleurs sont décrites dans les prochaines pages.

Mélange de couleurs

Afin de conclure cette introduction sur les phénomènes colorés, il faut nous intéresser aux capacités liées aux mélanges des couleurs. Deux principes peuvent être dégagés:

Synthèses additive et soustractive

Synthèses additive et soustractive

  • d’un point de vue additif, ce sont les couleurs physiques, qui agissent dans le domaine de la lumière.Le rouge, le vert et le bleu s’associent pour donner du blanc. Les écrans fonctionnent selon ce principe.
  • d’un point de vue soustractif, ce sont les couleurs chimiques, qui agissent dans le domaine de la matière. Le cyan, le magenta et le jaune s’associent pour donner du noir. Les pigments des peintres, les encres d’impression, reposent sur ce type de mélange.
Couleurs physiologiques

Couleurs physiologiques

Elles s’intéressent à l’interface humaine de perception, qui est constituée d’une part par l’œil, qui agit en tant que capteur, et d’autre part par le cerveau, qui tient un rôle d’interprète. Leur importance est considérable: grands nombres de phénomènes rapportés au cours de l’histoire trouvent leur explication dans notre capacité à voir les couleurs. L’incroyable force de notre vision réside dans le fait que nous ne constituons pas un récepteur impassible. L’œil est contraint à s’adapter à son environnement et produit des illusions qu’aucun procédé mécanique de capture n’est en mesure de fixer. En effet, comme l’a justement noté Goethe, la rétine possède une tendance naturelle à exprimer entièrement son activité. Ainsi, une sensation intense de rouge produira un certain voile verdâtre devant notre œil, qui cherche à rétablir l’équilibre. Il est intéressant de noter que le cerveau cherche particulièrement à retrouver sa référence de blanc ; il calibre de façon globale, tendant vers la neutralité, nos sensations colorées. Ce constat est très facile à obtenir ; il suffit de regarder à travers un verre coloré pour s’en rendre compte. Différents objets, blancs ou rouges, vus à travers un verre rouge, paraissent de la même couleur ; et pourtant, nous ne les voyons pas rouges, mais blancs.

Le développement des techniques scientifiques a permis d’analyser précisément le fonctionnement de l’œil. L’intérêt d’expliquer celui-ci en détail n’est ici pas très grand, mais une évolution significative est à noter en ce qui concerne la rétine. Si, comme le disent Zuppiroli et Bussac dans leur Traité des couleurs, pour le citadin, la vision des couleurs est un luxe, il n’en a pas toujours été ainsi. Les pré-mammifères évoluaient dans un monde en noir et blanc ; le trichromatisme propre à l’homme et aux primates, semble trouver son origine dans le besoin de distinguer un fruit rouge dans un arbre vert, une exigence dont nécessitaient les premiers cueilleurs.

Couleurs physiques

Couleurs physiques

Elles sont constituées par les phénomènes que produit la lumière. On peut aisément affirmer que la lumière est le fondement nécessaire de chaque couleur ; ou pour le dire autrement, sans la lumière, la couleur n’existe pas. En déroulant plus longuement cette analyse, on arrive à la conclusion que les couleurs sont avant tout des modifications de la lumière. Toute couleur est donc obscurcissement de la lumière.

Couleurs chimiques

Couleurs chimiques

Elles sont propres aux corps, c’est-à-dire à la matière. Contrairement aux deux autres types de couleur, les couleurs chimiques sont caractérisées par leur durée. Pourtant, il est inexact de croire que la couleur puisse appartenir à un corps ; elle résulte en réalité de l’interaction de la lumière et de la matière. Un exemple trivial nous aidera à comprendre cette affirmation: une robe qui est vue pourpre à la lumière du jour apparait noire lorsqu’on l’éclaire avec de la lumière verte. C’est la preuve que sa couleur pourpre ne lui appartient pas en propre.

Mark Rothko - Sans titre (1952)

Mark Rothko - Sans titre (1952)

Malgré ces explications précises sur la couleur, il apparaît comme essentiel de toujours s’efforcer de la ressentir plutôt que de se perdre à vouloir l’expliquer. Les théoriciens de la couleur sont les premiers à affirmer, comme le résume Albers en introduction de son ouvrage sur L’interaction des couleurs, qu’aucun système des couleurs ne peut en lui-même développer la sensibilité à la couleur. Les lois sont une base établie pour soutenir ses connaissances mais ne doivent pas dicter le travail de l’artiste. Celui-ci doit au contraire laisser son intuition le guider dans le monde de la couleur. Certes, elle possède son propre langage, mais il est à découvrir par chacun. Son véritable contenu émotionnel ne peut se dévoiler qu’à celui qui s’intéresse pleinement à elle ; en lui ouvrant son cœur, l’individu sera en mesure de ressentir les différentes sensations qu’elle peut produire. On peut ainsi noter les tentatives de nombreux artistes à l’époque du Bauhaus qui ont essayé, à l’aide de la couleur, d’exprimer leur voix intérieure. Wassily Kandinsky ou encore Paul Klee ont cherché à entrer en contact avec l’âme humaine, la couleur devant produire des vibrations intérieures.

Bien qu’extrêmes, ces tentatives s’appuient en partie sur des qualités connues mais malheureusement peu explicables, que possède la couleur. Elles peuvent être groupées en deux grandes catégories:

Les effets physiques

Rapprochement et proximité pour les couleurs claires, éloignement et distance pour les couleurs foncées, chaleur ou froideur, etc. On peut à ce titre citer Itten qui montre qu’un carré banc sur fond noir parait plus grand qu’un carré noir des mêmes dimensions sur fond blanc. Le blanc rayonne et efface les limites, alors que le gris rapetisse.

Les effets psychiques

Calme pour le vert ou énergie pour le rouge, spiritualité pour le bleu, folie pour le jaune, orgueil pour l’orange, inconscient pour le violet, etc. Ces effets sont extrêmement subjectifs. En dresser ici la liste précise n’apporterait pas grand chose à notre propos.

En raison de l’influence qu’exercent les couleurs les unes sur les autres, le carré de gauche parait orangé alors qu’il est identique à celui de droite.

En raison de l’influence qu’exercent les couleurs les unes sur les autres, le carré de gauche parait orangé alors qu’il est identique à celui de droite.

Suivant le contexte, les couleurs n’agissent pas de la même façon. Leurs effets sont différents si elles sont prises seules ou avec d’autres couleurs ; ou encore peut-on dire que les couleurs s’influencent mutuellement, qu’elles interagissent. Ce décalage est la conséquence de notre système perceptif. En effet, comme expliqué précédemment avec les couleurs physiologiques, l’œil et le cerveau interviennent de façon à rétablir l’équilibre coloré lorsque notre environnement est en proie à une couleur dominante.

On retrouve tout au long de l’histoire, de nombreux écrits cherchant à détailler ces phénomènes. L’ouvrage de Michel Eugène Chevreul, paru en 1832, étudie le contraste simultané. Il est considéré comme une des bases majeures de l’impressionnisme et du pointillisme. Il dévoile le comportement relatif des couleurs qui changent en fonction de la proximité d’autres couleurs. Les effets dont parlent Chevreul sont aujourd’hui plus connus et donc moins surprenants, mais ils ont été une véritable révélation à l’époque. Il montre ainsi que sur un fond rouge, le gris parait verdâtre ; sur un fond bleu, le gris parait orangé, etc.

Plus tard, Josef Albers, ancien élève de Johannes Itten au Bauhaus, expliquera, d’abord au sein de cette école puis plus tard dans un ouvrage qui reprend les bases de son enseignement, quelques effets de couleurs entre elles. L’influence de son professeur et l’importance qu’accordait cette établissement artistique à mieux analyser et ressentir la couleur et ses effets ont vraisemblablement marqué profondément Albers. Itten a par ailleurs publié un ouvrage, Art de la couleur, cité encore aujourd’hui comme une référence chez les coloristes. Un des plus importants chapitres explique les relations des couleurs entre elles par l’étude des sept contrastes que sont le contraste de la couleur en soi, le contraste clair-obscur, le contraste chaud-froid, le contraste des complémentaires, le contraste simultané, le contraste de qualité et le contraste de quantité.

Johannes Itten - Roue chromatique (1961)

Johannes Itten - Roue chromatique (1961)

La relation des couleurs conduit à une notion qui lui est presque indissociable, celle d’harmonie. En effet, si l’on arrive à comprendre comment l’homme réagit à la vision simultanée de plusieurs couleurs, il apparaît essentiel de pouvoir expliquer comment le satisfaire, ou, pour le formuler différemment, comment accorder justement les couleurs entre elles.

Selon Aristote, c’est dans les nombres et les proportions qu’il faut chercher l’harmonie ; les mathématiques sont considérés à cette époque comme l’élément unificateur qui peut accorder le monde. Les théoriciens de la couleur quant à eux estiment que l’harmonie est un ensemble neutre, qui ne tend vers aucune couleur, c’est-à-dire qui satisfait l’œil, qui ne le perturbe pas et ne l’oblige pas à adapter la vision ; Itten dit que deux couleurs ou plus sont harmonieuses quand, mélangées ensemble, elles donnent un gris neutre.

Malgré toutes les théories qui ont pu être élaborées au cours des siècles, il semble que l’harmonie ne puisse se définir de façon globale mais soit plus attachée à l’individu et à son contexte ; chacun est en mesure de s’en faire sa propre idée.

Cette notion d’harmonie colorée semblait trouver un écho dans la musique. En effet, bien qu’agissant différemment, les effets de la couleur ont souvent été comparés à ceux produits par une œuvre musicale ; nombreux sont ceux ayant cherchés à effectuer des rapprochements entre ces deux arts. Cette volonté d’établir un ordre mathématique, parenté au rythme de la musique, a parfois conduit à la rédaction de lois davantage basées sur leur finalité que sur les phénomènes qu’elles souhaitaient expliquer. Newton, au moment de définir le spectre émanant de la diffraction de la lumière blanche, nomment, arbitrairement, sept couleurs, comme sont sept les notes de la gamme. Itten compare son cercle chromatique en douze parties aux douze notes de la gamme du musicien. Suivant les mêmes parallèles, l’histoire a été le témoin de nombreuses inventions farfelues qui tentaient de transposer le principe d’instruments au monde de la couleur.

Wassily Kandinsky - Accords réciproques (1942)

Wassily Kandinsky - Accords réciproques (1942)

On ne peut évoquer le rapprochement entre ces deux arts sans parler de l’ouvrage de Kandinsky, du spirituel dans l’Art et dans la peinture en particulier. L’artiste, en même temps qu’il définit les différents effets des couleurs, essaie de rapprocher chacune des nuances aux sonorités d’un ou plusieurs instruments. Le bleu clair sonne comme une flûte, tandis que foncé il rappelle le violoncelle, la contrebasse et l’orgue ; à l’opposé, le jaune, transcrit l’excitation que provoque de la même façon les sons aigus d’une trompette ; le rouge, suivant son inclinaison, fera l’effet d’un tuba, d’un violon, d’un cor anglais ou même d’un basson.

Cependant, aussi poétiques et plaisantes que soient ces similitudes, il ne peut être omis qu’une différence significative existe entre l’optique et l’acoustique. En effet, si l’oreille est capable de reconnaître séparément deux sons émis simultanément, l’œil quant à lui, ne perçoit de deux lumières mélangées qu’une seule couleur, sans qu’il ne soit directement fait référence aux composantes du mélange. De plus, une œuvre musicale s’inscrit dans le temps, au contraire d’une œuvre picturale qui s’exprime davantage spatialement mais dont la globalité peut se saisir quasiment instantanément.

Il est pourtant tout à fait vraisemblable que ces recherches n’ont pas été vaines. Peut-être même constituent-elles été un maillon indispensable permettant à l’atteinte d’un absolu coloré. C’est en tout cas ce que laissent croire les écrits et les intentions des artistes au début du vingtième siècle. La musique a en effet été perçue à cette époque comme l’art absolu, car totalement hors de la figuration ; détachée de la nature, elle était en effet la seule pouvant atteindre efficacement l’âme. En visant le même but, la couleur s’est défaite de la représentation figurative pour parler son propre langage.

Bien que Kandinsky à son époque ne peut s’imaginer une couleur sans forme, les travaux d’artistes contemporains semblent avoir atteint un nouveau degré de perfection colorée. En effet, en abandonnant la palette du peintre, ils sont désormais capables de concevoir des œuvres d’une plus grande ampleur, nous immergeant, comme le souhaitait Rothko quand il réalisait ses toiles, dans la couleur. L’exemple le plus caractéristique est indéniablement celui de James Turrell, véritable virtuose de la lumière. Dans son livre L’homme qui marchait dans la couleur, Georges Didi-Huberman nous plonge dans l’univers de cet artiste hors du commun et conte les particularités de l’œuvre de Turrell.

James Turrell - Ganzfeld

James Turrell - Ganzfeld

La couleur n’est plus un attribut ou un accident mais véritablement un sujet. C’est une couleur monochrome, saturée, éclatante, sans ombre ni nuance, qui devient par le fait sans forme, sans limites. Une couleur qui se présente comme l’objet même. Elle est la lumière qui habite l’espace jusqu’à en devenir le lieu lui-même.

Présentée ici à son apogée, la couleur semble être à son opposé le plus extrême avec la typographie. Elle est une couleur sans forme alors que la typographie semble se concevoir comme une forme sans couleur. Elle est présentée comme un accès direct à l’âme, à la sensibilité de l’individu, tandis que le caractère ne devrait prétendre qu’à être le support de son contenu, c’est-à-dire le texte, qui lui seul véhicule la pensée de son auteur. Mais ce texte est-il véritablement l’unique médiateur à pouvoir prétendre impressionner son lecteur, ou bien la forme et la couleur des lettres qui le composent sont-elles susceptibles de jouer un rôle ?

Par le biais de l’étude de la couleur, plusieurs théoriciens ont montré l’influence que celle-ci exerçait sur la forme. Telle figure nous paraitra plus proche, tel autre plus lointaine ; l’une nous attirera tandis qu’une autre nous repoussera. Toutes ces caractéristiques de la couleur définies jusqu’ici ne sont-elles pas en mesure d’être exploitées afin d’apporter une dimension nouvelle au dessin de caractères ? La couleur n’a-t-elle jamais intégré le monde de l’écriture ? Voilà la question que se propose d’étudier notre prochaine section.

Avant de devenir typographiques, les écritures ont traversé les âges et se sont développées, lentement, mais continuellement. Encore aujourd’hui, les caractères évoluent, de nouveaux s’inventent, voire refont surface tel l’arrobase. Aussi loin que l’on remonte dans les siècles, dans les millénaires, on s’imagine mal la place que la couleur a pu jouer dans la construction de notre langage écrit. Pourtant quelques exemples intéressants existent et méritent d’être cités dans ces pages.

Égypte - Papyrus prisse (1900 av J.-C.)

Égypte - Papyrus prisse (1900 av J.-C.)

Il est ainsi surprenant d’apprendre que dans le système d’écriture développé par les Aztèques, les couleurs constituent un élément à part entière : chacune possède une valeur phonétique, se prononce et se combine avec d’autres éléments. Les phéniciens, onze siècle avant notre ère, écrivait aussi bien à l’encre noire que rouge. Les Égyptiens utilisaient eux aussi la couleur rouge, comme on peut l’observer sur le Papyrus Prisse, considéré comme le plus ancien livre égyptien connu. Sur d’autres inscriptions égyptiennes, cette couleur est employée pour ponctuer le texte tracé en noir. Chez les romains également le rouge est utilisé, probablement comme moyen distinctif.

Au Moyen-Âge, la ponctuation telle que nous la connaissons n’est pas encore complètement définie. La couleur rouge est alors utilisée pour marquée les initiales, les paragraphes, les lignes introductives, les titres, etc., c’est-à-dire tous les endroits du texte correspondant à ce qui est appelé la rubrique. Il est par ailleurs remarquable que le mot rubrique possède la même racine latine, ruber, que le terme rouge.

Une autre application de la couleur mérite notre attention. Il s’agit de la communication maritime. Elle s’effectue à l’aide de pavillons et de bannières et déploie un langage de forme et de couleurs très efficace. Son invention remonterait au moins au Ier et IIe millénaire av. J.-C. Les blasons ou encore les drapeaux constituent d’autres exemples de langages parallèles, codifiés, qui montrent la puissance exemplaire de la couleur.

Si l’on regarde de plus près comment est définie l’écriture, on s’imagine mal ce qui pourrait limiter la couleur (si ce n’est une contrainte technique). En effet, comme le remarque Roxane Jubert dans Graphisme, Typographie, Histoire, l’image semble avoir été partout à l’origine de l’écriture. Or l’image la plus évidente se conçoit-elle en noir et blanc ? Vraisemblablement pas. La définition-même de l’écriture n’omet pas la possibilité de disposer de couleurs : on la présente comme un ensemble de signes pouvant s’organiser spatialement, relever d’un arrangement spécifique, fonctionner comme un code et inscrire un langage.

Fust et Schöffer - Psaultier de Mayence (1459)

Fust et Schöffer - Psaultier de Mayence (1459)

Pourtant la technique n’a pas toujours cherché à s’éloigner de la couleur. Déjà quelques exemplaires de la Bible à 42 lignes de Gutenberg expérimentent une seconde impression à l’encre rouge aux endroits du texte correspondant à la rubrique. Peu de temps après, Johannes Fust et Peter Schöffer prolongent le travail de Gutenberg, et inaugure véritablement l’impression en couleur. Le Psaultier de Mayence qu’ils éditent emploie les couleurs bleu et rouge pour les initiales et le noir pour le texte.

Mais qu’en est-il aujourd’hui ? À l’heure où la création est presque intégralement informatisée, quelle attitude adopte les concepteurs visuels ? S’il est impensable de nos jours de travailler sans connaître un minimum son ordinateur et ses logiciels, est-il possible de se contenter des simples possibilités que les éditeurs nous proposent, ou au contraire, les créateurs ont-ils à s’approprier et adapter leurs outils à leurs besoins ? La prochaine partie tente de répondre à ses questions et propose un aperçu des capacités offertes par les machines actuelles.

La technique ne doit pas être ignorée. Elle influence directement la création en fournissant les outils avec lesquels le concepteur devra jouer. On peut ainsi noter au cours des âges toute une série d’évolutions majeures qui sont la conséquence directe de la découverte de nouvelles techniques ou de l’invention de nouvelles machines et qui ont modifié sensiblement la pratique des scribes, des dessinateurs d’alphabets, des typographes et des graphistes.

Alors que les techniques d’impression ont été révolutionnées au cours des siècles, le dessin de caractères semble s’accrocher à ses fondamentaux. Il faut dire que l’évolution de l’écriture, à laquelle est directement liée la typographie, ne peut être très rapide, et le moindre changement est parfois le résultat de centaines d’années de maturation.

Trames de quadrichromie

Trames de quadrichromie

De nos jours, la plus grande partie des impressions est réalisée sur ordinateur et tirée en quadrichromie. L’utilisation de plusieurs couleurs n’augmente pas les couts. Pourtant la typographie repose encore actuellement sur les mêmes possibilités qu’au temps du plomb. L’ère informatique n’a pas épargné la qualité qu’insufflaient les professionnels dans la composition typographique, et à rendu cet art accessible à tous, néophytes comme experts. Ces derniers ont certainement vu dans l’ordinateur plus un fléau qu’une opportunité de se renouveler. En réalité, depuis l’apparition de l’ordinateur, on semble davantage attaché à retrouver la grandeur de l’art typographique tel qu’il se concevait au temps du plomb plutôt qu’intéressé par une exploration des possibilités offertes par cette nouvelle machine.

Il existe malgré tout une avant-garde jouant avec les possibilités offertes par l’ordinateur pour expérimenter une typographie inimaginable avec la composition chaude. Ces créateurs d’une nouvelle génération ont autant à se préoccuper de programmation (c’est-à-dire réussir à parler le même langage que celui de leur machine) que de dessin à proprement parler. Letterror, avec son alphabet Beowolf, cherche ainsi à passer outre les paramètres fixés par des programmeurs non typographes et a intégré l’aléatoire comme élément constitutif de son caractère.

Letterror - Beowolf

Letterror - Beowolf

Le studio hollandais peut ainsi prétendre avoir franchi une première marche vers l’indépendance. Il s’est écarté du moule imposé par les logiciels et les décisions que prennent leurs éditeurs, refusant ainsi l’homogénéité régnant sur la création graphique internationale.

L’innovation typographique actuelle, parce que la création et la distribution des caractères s’effectuent exclusivement sur ordinateur, ne peut se faire sans une connaissance approfondie de l’outil avec lequel le dessinateur travaille. Les prochaines pages s’efforceront d’expliquer au mieux la situation actuelle et les diverses possibilités offertes aux créateurs.

Courbes de Bézier, cubique à gauche et quadratique à droite

Courbes de Bézier, cubique à gauche et quadratique à droite

Deux géants se partagent actuellement les formats des fontes sur ordinateur: Adobe avec le format PostScript et Microsoft avec le format TrueType. Le premier définit les lettres en courbes de bézier cubiques, tandis que le second utilise les courbes de bézier quadratiques. La résolution des fontes TrueType monte jusqu’à 16384 unités tandis que PostScript est limité à 1000 unités. Cependant, depuis 1996, les deux concurrents se sont accordés à un format commun: l’OpenType, dont la résolution monte jusqu’à 16384 unités. En réalité, ce format est toujours séparé en OpenType PostScript (fichiers .otf) et en OpenType TrueType (fichiers .ttf), suivant la façon dont sont définies les courbes et l’algorithme d’optimisation utilisé pour l’affichage des petits corps (hinting). Les avantages essentiels du format OpenType sont de garantir une compatibilité entre les plates-formes (Mac, Windows et même Linux), d’offrir une plage de 65536 glyphes et de posséder des fonctions de typographie évoluées (réglage des approches de paire, ligatures, etc.).

L’inconvénient majeur nous concernant ici est l’impossibilité de disposer de différentes couches au sein d’une même fonte (alors que l’on dispose de calques sur l’ensemble des logiciels de création) ; une lettre ne peut être définie que par une couleur, les tracés qui la composent étant dit dans le sens des aiguilles d’une montre (clockwise) pour les parties pleines ou dans le sens inverse des aiguilles d’une montre (counterclockwise) pour les parties vides.

Face à cette difficulté, plusieurs possibilités ont été imaginées pour offrir aux graphistes et aux typographes des alphabets en plusieurs couleurs. Ces alternatives sont décrites dans les pages suivantes. Il faut toutefois noter qu’aucune des pistes explorées ne propose une solution simple et efficace. Il s’agit de bricolage, plus ou moins astucieux, qui essaie de surpasser les limites imposées par les formats de fontes vieillissants.

Basés sur les formats sur lesquels ils s’appuyent, les logiciels de création de caractères sont un reflet assez réaliste des capacités actuelles offertes par la technologie dans ce domaine. Il existe actuellement sur le marché deux acteurs majeurs: FontLab et FontForge. Leurs principales caractéristiques permettent d’obtenir un premier aperçu assez révélateur de la situation actuelle.

Ces deux logiciels sont décrits en détail dans les prochaines pages.

FontLab

Interface de FontLab

FontLab Studio est l’outil de référence utilisé par la grande majorité des dessinateurs de caractères. Bien que disposant de puissantes fonctions avancées qui nécessitent un apprentissage approfondi, FontLab est un logiciel abordable aux néophytes qui peuvent assez rapidement acquérir une pratique de base suffisante pour tester leurs propres créations.

Le défaut majeur de FontLab tient dans sa conception qui tente de retranscrire au plus proche l’époque révolue du plomb, en ignorant les capacités propres à l’ordinateur et aux nouveaux moyens d’impression. Ainsi, le logiciel ne propose de calques ni pour la création de fontes multicouches. Seuls des calques standards, Outline et Mask, sont présents pour aider à la construction et à l’harmonisation des glyphes (leur nombre et leur fonction n’est malheureusement pas éditables). On regrettera également que FontLab n’autorise pas de coordonnées décimales et contraigne les points sur une grille stricte et réductrice, alors que les formats de fontes et les ordinateurs actuels supportent les alphabets définis de la sorte.

Finalement, la reproche principale qui peut être faite à l’égard de ce programme est de se limiter simplement au dessin se basant sur les possibilités offertes par les fontes OpenType, PostScript et TrueType. On souhaiterait davantage d’engagement pour surpasser les contraintes imposées par ces formats et permettre à l’utilisateur une plus grande liberté dans ses expérimentations. Il convient également de noter que ce programme reste relativement onéreux (environ 500 euros), et n’est donc pas accessible à tous, même si des versions plus légères et moins chères existent. De plus, la dernière mise à jour de ce produit remonte à juillet 2007 et la dernière version majeure date du mois de décembre 2005.

Interface de FontForge

Interface de FontForge

FontForge dispose au contraire d’avantages séduisants: les mises à jour sont très fréquentes (tous les deux mois en moyenne) et il est distribué gratuitement sans aucune limitation. Toutefois, quelques inconvénients limitent son utilisation: tout d’abord, ce programme est développé pour un environnement Linux ; il faudra donc disposer d’un émulateur (gratuit pour Windows et présent par défaut sur les Macs) pour pouvoir le faire fonctionner. De plus, si l’installation reste relativement aisée sur Mac, elle peut s’avérer beaucoup plus longue et fastidieuse sur Windows. Par ailleurs, ce logiciel peut se montrer instable et se fermer sans préavis. Grâce aux sauvegardes et à la récupération automatiques, les conséquences sont moindres mais le travail en est tout de même perturbé.

Les outils et les fonctionnalités sont sensiblement les mêmes que ceux de FontLab, même si l’on peut regretter de ne disposer d’un aperçu rapide du glyphe que l’on dessine, que les outils ne soient pas accessibles à l’aide de raccourcis, ou encore que la plume ne soit pas plus performante. Quelques précieuses caractéristiques le distinguent malgré tout de son rival: premièrement, FontForge supporte les fontes multicouches et offre par conséquent la possibilité de disposer de plusieurs calques ; ensuite, il autorise l’emploi des nombres à virgule pour définir les points qui ne limitent ainsi plus la définition des caractères à une grille rigide ; enfin, on peut également noter la capacité à générer efficacement des contours à partir de simples tracés (permettant notamment de créer de multiples graisses à partir d’un même tracé).

Malgré quelques difficultés (que le concepteur et développeur du logiciel semble prendre grand plaisir à corriger aux vus de sa réactivité et de son enthousiasme), FontForge apparaît supérieur à son concurrent et gagnerait à être plus connu. Il semble en effet complètement masqué par l’imposant FontLab.

Parallèlement aux outils de création de caractères (FontLab et FontForge), plusieurs voies se dessinent. Bien qu’essentiellement expérimentales, elles offrent la possibilité d’envisager les solutions qui conviendraient le mieux à la distribution de fontes en plusieurs couleurs. Ces différentes pistes essaient, en se basant sur les possibilités actuelles des logiciels de composition graphique, de proposer aux concepteurs des alternatives aux traditionnels alphabets monochromes.

Voici les solutions étudiées dans les prochains articles:

Malgré la complexité de toutes les solutions détaillées dans les prochains articles, la création d’alphabets en plusieurs couleurs intéresse de nombreux graphistes et typographes. Même si pour la plupart, ils ne sont pas distribués et restent entre les mains de leur créateur, ils sont la preuve qu’un intérêt pour la création typographique colorée existe et que des solutions techniques mériteraient d’être développées.

Le prochain chapitre propose d’étudier et de classer, suivant leurs caractéristiques, quelques lettres en couleurs parmi les plus remarquables.

Paradoxalement, la solution la plus encourageante est également une des plus anciennes. Sorties en 1984, au même moment que les fontes PS Type 1, les fontes PS Type 3 disposent de l’intégralité du langage PostScript de niveau 3 (ombres, couleurs, dégradés, transparence, motifs, intégration d’images bitmap, traits d’épaisseur variable, etc.). Moins coûteux également à l’achat, les raisons de son oubli sont dues à l’absence des technologies de hinting et de compression présents dans les fontes PS Type 1: le fichier n’est pas codé et est par conséquent plus lourd, mais surtout plus long à interpréter.

Ce format, qui a rencontré un bref succès, a été rapidement abandonné. Windows et Mac OS X ne supporte pas les fontes PS Type 3.On trouve sur internet quelques fontes PS Type 3 en libre téléchargement, mais il s’agit essentiellement de recherches faites par des scientifiques et non des typographes. De plus, ce format n’étant pas accessible sur les ordinateurs actuels, son intérêt en est fortement limité.

Bernard Desruisseaux - MetamorFont

Bernard Desruisseaux - MetamorFont

En raison de l’ancienneté de ce format, et l’abandon par ses initiateurs de son développement, aucun exemple d’alphabets en plusieurs couleurs n’a été trouvé ni n’a pu être expérimenté. Seules quelques recherches sur les capacités de traitement aléatoire offertes par ce format ont été découvertes, comme la MetamorFont de Bernard Desruisseaux.

L’alphabet Saubr en SVG sous Internet Explorer

L’alphabet Saubr en SVG sous Internet Explorer

SVG (Scalable Vector Graphics) est un format de fichier ouvert basé sur le langage XML et permet de définir des données vectorielles. Utilisés principalement sur internet, les fichiers SVG peuvent être visualisés directement dans la plupart des navigateurs. Cependant, leur support diffère suivant celui utilisé. Nous y reviendrons par la suite. Commençons plutôt par les points positifs.

La partie de ce langage qui nous intéresse est celle permettant de définir des fontes. Créée de cette façon, chaque lettre peut disposer de couleurs différentes, de multiples couches, de traits, de dégradés, etc. Il semblerait même que les possibilités offertes par ce format soient plus puissantes que celles du PS Type 3. Ce langage faisant parti des standards du web définis par le World Wide Web Consortium (W3C), il est possible d’attribuer des styles (comme sur les pages web) aux différentes parties des lettres et ainsi de modifier aisément les différents attributs d’un caractère: couleur du glyphe, contour, etc.

Cependant, tout comme le PS Type 3 (et bien d’autres formats que nous étudierons), le support est hasardeux: si Illustrator et les principaux navigateurs ouvrent les fichiers SVG classiques, les fichiers intégrant des fontes ne sont visibles que sous Internet Explorer avec le plugin Adobe SVG Viewer. Ce dernier n’a pas été mis à jour depuis Avril 2005. Abobe a par ailleurs annoncé au début de l’année 2009 arrêter le développement de ce plugin. Et pour cause. Cette sous-partie du langage SVG n’a pas été mise à jour depuis le 14 Janvier 2003. On comprend alors aisément que les distributeurs ne souhaitent pas investir dans une technologie qui semble abandonnée.

Il n’est donc pas étonnant que les logiciels offrant la possibilité de développer de telles fontes ne soient pas en grand nombre. Il semblerait en effet que seul Fontforge puisse actuellement supporter l’exportation dans ce format. Et encore… les essais effectués n’ont pas été concluants et le seul alphabet ayant fonctionné a été programmé et assemblé manuellement à l’aide d’un éditeur de texte. Malgré la complexité d’une telle tâche, le résultat est encourageant. On peut cependant regretter qu’il ne soit pas possible de composer un texte sur plusieurs lignes et qu’il faille positionner chaque ligne une par une.

Aperçu du plugin PhotoFont sous Photoshop

Aperçu du plugin PhotoFont sous Photoshop

Développé par la société FontLab, PhotoFont est un plugin permettant la visualisation de fontes bitmap au format PHF. Les lettres sont enregistrées au format PNG et l’alphabet est organisé à l’aide d’une structure basée sur le langage XML. PNG (Portable Network Graphics) est un format d’image ouvert disposant d’une palette de seize millions de couleurs incluant la transparence. Cette transparence peut être de deux sortes:

  • soit une couleur globale est définie comme transparente,
  • soit chaque couleur dispose d’un canal supplémentaire (en plus des rouge, vert et bleu) dit alpha permettant de déterminer l’opacité de la couleur.

Chaque glyphe peut être créé avec BitFonter, vendu par le même distributeur, ou à l’aide de n’importe quel logiciel pouvant exporter des fichiers PNG. Les propriétés de la fonte (nom, version, style, encodage, approches, etc.) doivent alors être enregistrées à l’aide d’un simple éditeur de texte.

Actuellement, la société FontLab ne propose le plugin de visualisation que pour Photoshop et sur internet (un code mélangeant Flash et Javascript remplace du texte à la volée). Une version du plugin pour InDesign et QuarkXpress est annoncée pour l’année 2009.

Bien que permettant la création de fontes en couleur, l’inconvénient majeure de ce format réside dans le fait que les glyphes sont enregistrés en tant qu’image, c’est à dire pixellisés, et non vectoriellement. De plus, FontLab semble peu actif et la disponibilité du plugin pour les deux logiciels majeurs de mise en page n’est pour le moment qu’hypothétique, d’autant que cette technologie ne semble pas remporter un franc succès pour le moment. Pour preuve, les seuls alphabets de ce type distribués actuellement ont été trouvés sur le site du développeur, à titre d’exemple.

HandMadeFont distribue ses alphabets au format Photoshop

HandMadeFont distribue ses alphabets au format Photoshop

Face à l’incapacité des principaux formats de fonte de proposer une solution acceptable quant à la distribution d’alphabets en plusieurs couleurs, certaines fonderies et certains créateurs choisissent de commercialiser leurs typographies par l’intermédiaire de formats non conçus pour ce genre d’usage. C’est ainsi que l’on peut trouver des alphabets à monter soi-même à l’aide des différents logiciels de création graphique. Distribués au format Photoshop, Illustrator ou encore PDF, ces caractères laissent à son utilisateur la laborieuse tâche de composer lui-même ses mots, lettre par lettre. On comprendra aisément que ce genre de création omet une partie primordiale de développement d’une fonte, à savoir le réglage des approches, et est, par conséquent, réservé à un usage extrêmement limité, pour des compositions typo-graphiques ou pour des titrages courts tout au mieux.

L’History Remixer est une application conçue pour mixer les 21 couches que proposent l’alphabet History créé par Peter Bil’ak. Le résultat obtenu est exporté en PDF pour être intégré dans un logiciel de création graphique.

L’History Remixer est une application conçue pour mixer les 21 couches que proposent l’alphabet History créé par Peter Bil’ak. Le résultat obtenu est exporté en PDF pour être intégré dans un logiciel de création graphique.

Une alternative plus intéressante exploitant en partie ce mode d’assemblage se trouve dans la programmation (souvent en collaboration avec un développeur) d’applications uniques qui permettent de jouer plus aisément avec l’alphabet imaginé par son concepteur. Si certains de ces programmes ne proposent qu’un aperçu du résultat escomptable (comme le BMF Elettriche d’Alessio Leonardi, 2007, chez BuyMyFonts), d’autres au contraire offrent la possibilité d’exporter au format vectoriel (en EPS ou en PDF) la réalisation effectuée à l’aide du logiciel. Le fichier ainsi obtenu peut être intégré au sein d’une composition dans la plupart des programmes de conception graphique. Bien qu’étant plus pratique que les solutions présentées précédemment, cette façon de procéder nécessite toujours 3 étapes:

  • composition du texte sur l’application particulière,
  • exportation du fichier,
  • intégration dans le logiciel de mise en page.

De plus, ces programmes de visualisation ne disposent généralement pas de paramètres avancés de typographie comme la modification des approches ou le réglage de l’interlignage.

La solution la plus courante actuellement consiste à distribuer les fontes nécessitant plusieurs couleurs en séparant les couches en autant de fichiers. Ainsi, un alphabet en deux couleurs devra posséder deux couches, soit deux fichiers. Dans cet exemple, l’utilisateur aura à superposer deux fois le même texte pour reconstituer l’alphabet. Cette technique est fort pratique mais contraint à bien séparer les deux couches, l’une étant donc, pour tous les glyphes, devant l’autre. Il n’est pas possible, de cette façon, de modifier l’ordre des couleurs en fonction des caractères et permettre ainsi des effets différents en jouant avec les modes de fusion par exemple. Un autre risque pourrait provenir d’une manipulation involontaire qui créerait un décalage entre ces deux couches.

Gillé - Madame (1820), version OpenType par Linotype

Gillé - Madame (1820), version OpenType par Linotype

Linotype propose, dans le même esprit, une version OpenType du caractère Madame, imaginé par Gillé en 1820. Distribuée de cette façon, la fonte regroupe toutes les couches dans le même fichier. L’utilisateur peut sélectionner celle désirée par l’intermédiaire du menu OpenType en choisissant le jeu stylistique voulue:

  • Standard: toutes les couches sont réunies
  • Jeu II: contour
  • Jeu III: remplissage en partie inférieure
  • Jeu IV: remplissage en partie supérieure
  • Jeu V: ornement au premier plan
Paul Thurby - Lettres illustrées

Paul Thurby - Lettres illustrées

La couleur s’est invitée dans le monde sacré de l’écriture il y a de cela des siècles. Cependant, comme expliqué au début de ce mémoire, nous nous focaliserons uniquement sur les créations modernes et contemporaines, c’est à dire typographiques. De nombreux manuscrits du moyen-âge, et même une fois l’invention de l’imprimerie, se sont ornés de magnifiques lettrines. Ces réalisations ne sont pas dénuées d’intérêt mais semblent bien éloignées des considérations actuelles. Il ne sera pas non plus question d’alphabets illustrés, mettant en scène des personnages, des animaux, jouant avec les branchages des arbres ou d’autres éléments figuratifs. Ces créations, souvent emplies d’humour et d’ingéniosité, utilisent la lettre à des fins plastiques et cherchent à trouver en elle une certaine représentation du monde. Ces deux univers pourraient se voir chacun consacrer un mémoire mais ils ne sont pas le sujet de celui-ci.

Et pourtant, bien que soient exclus ces deux types de caractères, il reste un éventail très large d’inventions typographiques en couleur. Les pages qui suivent tentent de les répertorier, en les classant par similarité et en dressant une liste de paramètres les constituant. Ainsi établi, cet inventaire permettra de mieux situer les possibilités des alphabets polychromatiques et servira de base à une réflexion sur leurs particularités, leurs intérêts et leurs applications. Ce chapitre laisse majoritairement la place aux images. À travers leurs rapprochements et leurs comparaisons, il est déjà possible de déceler des réponses aux questions posées jusqu’ici.

Les trois catégories que nous proposons de mettre en place sont le reflet de différentes approches quant à la création d’alphabets en couleurs. Elles sont tout autant liées à la mentalité des concepteurs, qu’à l’évolution des techniques. Ces rubriques ne sont pas parfaites et certaines œuvres qu’elles contiennent pourraient vraisemblablement être rangées dans un autre groupe ou pourraient même en mériter un nouveau. Ces imprécisions ne sont en réalité pas bien importantes. En effet, l’essentiel est que, par le biais de cette classification, nous soyons en mesure de mieux comprendre les intentions de ces dessinateurs de caractères d’un nouveau genre.

a. Simulation
Milton Glaser - Filmsense (1988)

Milton Glaser - Filmsense (1988)

La première recueille des alphabets qui, bien que n’étant pas à proprement parler en plusieurs couleurs, ont pourtant une parenté proche avec le sujet de ce mémoire. Il se trouve que les concepteurs, limités par les contraintes techniques de création et d’impression, détournent l’impossibilité de créer des lettres polychromatiques en jouant avec différentes valeurs d’une même couleur. Celles-ci sont obtenues à l’aide de tramages, de points, de traits, etc. Le résultat est une fonte monochrome qui rivalise d’astuce graphique pour se colorer.

Même si les caractères qu’elle présente sont peu sensationnels, cette catégorie constitue une entrée en matière essentielle. Elle fait œuvre de transition entre le monde noir de la typographie héritée du plomb et le monde coloré ouvert par les ordinateurs et l’impression offset. Elle est un témoignage de la volonté d’évolution qui anime les designers de tous temps.

b. Décoration
Kris Sowersby (Klim Type Foundry) - Wild Flour

Kris Sowersby (Klim Type Foundry) - Wild Flour

La deuxième catégorie est très certainement la plus fournie et pouvant se vanter de nombreux exemples anciens. Le point commun des alphabets de cette section est l’utilisation d’une lettre relativement commune qui sert de base et qui est par la suite enrichie d’une ou plusieurs couches décoratives, comme par exemple des ombres, des ornements, ou encore d’effets pour simuler le relief. Ces ajouts ne sont pas essentiels pour comprendre les lettres et peuvent être enlevés ou ajoutés sans perturber la lecture du caractère principal.

c. Structure
Skinny ships - Handy Kandy

Skinny ships - Handy Kandy

Enfin, dans la dernière partie, nous verrons des alphabets décomposés en plusieurs parties (ou modules), en fonction de leur anatomie. Ces parties peuvent se superposer, donner aux lettres une impression plus ou moins grande de relief, d’espace, de profondeur. Toutes les parties, parce qu’elles segmentent la lettre, sont utiles pour comprendre l’alphabet. Il s’agit vraisemblablement de la catégorie la plus intéressante car elle emploie la couleur non pas comme un simple artifice qui vient ornementer la fonte, mais réellement comme un élément essentiel dans sa constitution.

Les alphabets présentés ici ont essentiellement émergés grâce aux nouvelles possibilités que permettaient la photocomposition ou plus tard les caractères transfert. Pourtant, limitées par les mêmes contraintes chromatiques qu’auparavant, des fontes sont encore créées aujourd’hui en employant des astuces pour simuler des demi-teintes en noir et blanc.

  • Roger Excoffon - Calypso (1958)

    Roger Excoffon - Calypso (1958)

  • Sylvia Tournerie & Gilles Poplin - Copland (2005)

    Sylvia Tournerie & Gilles Poplin - Copland (2005)

  • Rosemarie Tissi - Sinaloa (1974)

    Rosemarie Tissi - Sinaloa (1974)

  • Trevor Hatchett - Good Vibrations (1973)

    Trevor Hatchett - Good Vibrations (1973)

  • Stack

    Stack

  • Rainbow Bass

    Rainbow Bass

  • Quelques lettres décoratives

    Quelques lettres décoratives

  • A.M. Cassandre - Acier (1930)

    A.M. Cassandre - Acier (1930)

Cette catégorie s’axe principalement autour des caractères de type western. Ils jouent en effet autant sur l’intérieur de la lettre, par l’ajout d’ornements, que sur l’extérieur, où se déploient contour et relief. Les alphabets sont essentiellement basés sur les capacités qu’offraient les méthodes de composition manuelle, comme on peut encore le remarquer par l’emploi d’effets de surimpression. Bien entendu, certaines créations plus récentes s’en détachent et proposent des solutions plus contemporaines.

Kim Buker Chansler, Carl Crossgrove & Carol Twombly -  Pepperwood, Rosewood & Zebrawood (1994)

Kim Buker Chansler, Carl Crossgrove & Carol Twombly - Pepperwood, Rosewood & Zebrawood (1994)

Nous commencerons par une étude des éléments extérieurs pour nous recentrer progressivement sur la lettre elle-même et détailler les effets intérieurs qui lui sont introduits. Nous pourrons ainsi observer que les limites avec la catégorie suivante, qui se préoccupe des lettres qui intègrent la couleur au sein-même de leur structure, s’estompent.

Voici la liste des différentes applications décoratives de la couleur:

Décoration extérieure

Décoration intérieure

  • 3e tome de la monographie de Victor Vasarely (1974)

    3e tome de la monographie de Victor Vasarely (1974)

  • Brochure pour Citroën (1968)

    Brochure pour Citroën (1968)

  • Drew Marshall - Booodoni

    Drew Marshall - Booodoni

  • Justin Thomas Kay - Type development for Zoo York juniors

    Justin Thomas Kay - Type development for Zoo York juniors

  • Brochure pour Citroën (1974)

    Brochure pour Citroën (1974)

  • Alphabet 3D

    Alphabet 3D

  • Brochure pour Citroën (1975)

    Brochure pour Citroën (1975)

  • Nouvel album de lettres fuyantes, chromolithographie française

    Nouvel album de lettres fuyantes, chromolithographie française

  • T U V W X Y Z · & · ?, lettres diverses

    T U V W X Y Z · & · ?, lettres diverses

  • Martin Woodtli - Door2door (2003)

    Martin Woodtli - Door2door (2003)

  • Étiquette d’oranges San Francisco (v.1950)

    Étiquette d’oranges San Francisco (v.1950)

  • Milton Glaser - caractère Brugger pour la société Bruegger's

    Milton Glaser - caractère Brugger pour la société Bruegger's

  • Jonathan Hoefler - Cyclone (2000)

    Jonathan Hoefler - Cyclone (2000)

  • Jean-Baptiste Levée - Nikau - Stimulation & Inspiration

    Jean-Baptiste Levée - Nikau - Stimulation & Inspiration

  • Niklaus Troxler - 20 ans du petit théâtre de Lucerne (1986)

    Niklaus Troxler - 20 ans du petit théâtre de Lucerne (1986)

  • Niklaus Troxler - Affiche culturelle (1994)

    Niklaus Troxler - Affiche culturelle (1994)

  • Fanette Mellier - Fontenew (2007)

    Fanette Mellier - Fontenew (2007)

  • Fanette Mellier - Fontenew (2007)

    Fanette Mellier - Fontenew (2007)

  • 2 colour wooden type

    2 colour wooden type

  • Roman Scherer - Luzerne, Suisse

    Roman Scherer - Luzerne, Suisse

  • Caractère grotesque 2 couleurs

    Caractère grotesque 2 couleurs

  • Letraset - Alphabet Stripes

    Letraset - Alphabet Stripes

  • Atari, Pin Pong

    Atari, Pin Pong

  • Nick Dart - Go! Zilla

    Nick Dart - Go! Zilla

  • Matt W. Moore - Nike skateboarding (2007)

    Matt W. Moore - Nike skateboarding (2007)

  • Jean-Baptiste Levée - Épizootie, détail (2008)

    Jean-Baptiste Levée - Épizootie, détail (2008)

  • Hort - Elektrostar

    Hort - Elektrostar

  • Stefanie Schwartz - FF Polymorph

    Stefanie Schwartz - FF Polymorph

  • Stefanie Schwartz - FF Polymorph

    Stefanie Schwartz - FF Polymorph

  • Andrea Tinnes - Type jockey

    Andrea Tinnes - Type jockey

  • Andrea Tinnes - Type jockey

    Andrea Tinnes - Type jockey

  • Pour clôturer cette rubrique, voici la super-fonte de Peter Bil’ak, l’History. Inspirée des multiples styles typographiques qui ont marqué l’histoire, la police du slovaque comporte 21 couches différentes qui peuvent être mixées suivant les envies et les besoins.

    Bien qu’essentiellement décorative, elle s’intéresse aux différentes caractéristiques de la lettre et constitue un premier pas vers la prochaine rubrique.

  • Peter Bil’ak - History

    Peter Bil’ak - History

  • Peter Bil’ak - History

    Peter Bil’ak - History

  • Peter Bil’ak - History

    Peter Bil’ak - History

Si la rubrique précédente prenait la lettre pour prétexte et rivalisait d’astuces pour l’habiller, les pages qui viennent cherchent au contraire à rentrer au cœur de la lettre, à la décortiquer, en couleurs.

Nous essayerons de distinguer les diverses façons de procéder qu’ont employé les dessinateurs de ces caractères. Pour se faire, nous débuterons notre étude par des alphabets très graphiques, basés sur des grilles ou combinant différents modules pour recréer les lettres. Puis, progressivement, nous quitterons cet univers ludique pour nous diriger vers des créations davantage typographiques.

A.M. Cassandre - Bifur (1929)

A.M. Cassandre - Bifur (1929)

Voici la liste des différentes applications constructives de la couleur que nous allons étudier:

  • Pentagram - Fort Worth Museum

    Pentagram - Fort Worth Museum

  • Olaf Nicolai & Stephan Müller (LineTo) - Nicolai (2002)

    Olaf Nicolai & Stephan Müller (LineTo) - Nicolai (2002)

  • Thomas L’Excellent - Saubr (2007)

    Thomas L’Excellent - Saubr (2007)

  • Jonathan Hoefler - Gestalt

    Jonathan Hoefler - Gestalt

  • Fanette Mellier - Circus

    Fanette Mellier - Circus

  • Atelier Ter Bekke-Behage

    Atelier Ter Bekke-Behage

  • Pierre di Sciullio - Minimum

    Pierre di Sciullio - Minimum

  • Igor Bastidas - Today is not Sunday (2008)

    Igor Bastidas - Today is not Sunday (2008)

  • Nexon, no game no gain

    Nexon, no game no gain

  • William Hessel & Félix Demargne - Farifonte

    William Hessel & Félix Demargne - Farifonte

  • Philippe Apeloig - França.Br (2008)

    Philippe Apeloig - França.Br (2008)

  • Pierre di Sciullio - Sonia

    Pierre di Sciullio - Sonia

  • Frozen Sound - Play with type

    Frozen Sound - Play with type

  • Marin van Uhm - Lettrage

    Marin van Uhm - Lettrage

  • Toan Vu Huu - Wordandsound

    Toan Vu Huu - Wordandsound

  • Hort - Das Berlin Music Commission

    Hort - Das Berlin Music Commission

  • Joakim Jansson - Digital Etikett

    Joakim Jansson - Digital Etikett

  • Alex Sheldon - Mifur (2008)

    Alex Sheldon - Mifur (2008)

  • Travis Stearns - Skute

    Travis Stearns - Skute

  • Tim Fishlock (2006)

    Tim Fishlock (2006)

  • Bicolor

    Bicolor

  • Hudson-Powell - Responsive type alphabet

    Hudson-Powell - Responsive type alphabet

  • J.K. Keller - Paulette Ribbon

    J.K. Keller - Paulette Ribbon

  • Philippe Apeloig - The Poster

    Philippe Apeloig - The Poster

  • Gustavo Garcia

    Gustavo Garcia

  • Jack Daly - New Northern Pride

    Jack Daly - New Northern Pride

  • Niklaus Troxler - Children are the rhythm of the world (2004)

    Niklaus Troxler - Children are the rhythm of the world (2004)

  • Konst & Teknik - Morse alphabet (2006)

    Konst & Teknik - Morse alphabet (2006)

  • Götz Gramlich - Ingrim (2008)

    Götz Gramlich - Ingrim (2008)

  • Atelier Ter Bekke-Behage - Cueco ou la nature des choses

    Atelier Ter Bekke-Behage - Cueco ou la nature des choses

  • Labels Via 2009

    Labels Via 2009

  • Vincent Perrottet - Vœux CRIPS Île-de-France (2008)

    Vincent Perrottet - Vœux CRIPS Île-de-France (2008)

  • Pierre di Sciullio - Nicolas

    Pierre di Sciullio - Nicolas

  • Moiré - Balkankaravan

    Moiré - Balkankaravan

  • Skinny ships - Paja-o-rama

    Skinny ships - Paja-o-rama

  • Thomas L’Excellent - Identité personnelle

    Thomas L’Excellent - Identité personnelle

  • Aurélien Vret

    Aurélien Vret

  • Vous voici arrivés à la fin de notre inventaire des alphabets conçus en plusieurs couleurs. Je vous invite sans plus attendre à consulter la conclusion de ce mémoire et tenter ainsi d’appréhender plus globalement les tenants et aboutissants de cette réflexion.